lundi 21 mars 2016

5/ Quatrième Chapitre - Ma vie d'adulte - Le début de ma vie "indépendante"


Quatrième Chapitre

MA VIE D'ADULTE -
LE DÉBUT DE MA VIE "INDEPENDANTE"
 
 
 
Donc, me voici enfin libre !  Débarrassé de cette vie familiale, pesante. Enfin, j'étais libre de prendre mes propres décisions, sans avoir a en rendre compte a personne. Libre comme l'air quoi !

Ah mais, détrompez vous. Ce n'était pas aussi simple que ça.
D'abord il fallait que je trouve un logement. Pour commencer, je me suis installé au "YMCA" a la Porte Louise, le temps de trouver un logement permanent, ou je pourrais vivre pleinement mon indépendance. Le "YMCA" n'ayant pas les atouts de celui des "Village People", je me mis a la recherche d'un petit meublé. J'en trouvai un assez rapidement en plein centre ville, rue des Moineaux, ce qui était naturel pour moi qui m'était fait traiter de noms d'oiseaux par mes parents. C'était pratique, a dix minutes a pieds de la Gare Centrale, d'ou je prenais le train pour l'aéroport. La maison était tenue par Mme. Slingeneyer,  qui avait aménagé cette maison en plusieurs flats garnis. Ce n'était  pas luxueux, loin de là. En fait il n'y avait pas de luxe du tout, c'était plutôt "spartiate"; La chambrette que j'avais louée mesurait a peine 3 x 2 mètres, avec un coin de toilette. Il y avait un lit d'une personne, une petite penderie, un table et deux chaises. Mais comme c'était mon premier logement d'indépendant, cela me semblait être un "palais". Chose non négligeable, le loyer n'était que de 500 FB par mois, avec un supplément de 100 FB pour le chauffage en hiver. Mon salaire a la "SABENA" étant de 3000 FB, cela me laisserait 2400 FB pour vivre. Ce n'était pas le "Pérou", mais assez, a condition de ne pas faire de folies.


Mme. S... m'avait promis, que, dès qu'une chambre plus spacieuse se libèrerait, elle serait pour moi. Dès les premiers jours j'avais compris qu'elle m'aimait bien et qu'elle me prit sous sa protection en quelque sorte. Elle avait tout de suite deviné que j'étais gay. Il y en avait deux autres dans la maison, un infirmier et un autre, qui logeait là qu'occasionnellement. Elle savait donc de quoi il en retournait et cela ne la dérangeait absolument pas.
Mes soirées se passaient à draguer et à fréquenter les bars, qui avaient commencé à apparaître un peu partout. Il y avait le "Manoir", le "Stuart 1900", le "Canard Sauvage", la Réserve", "l'Atlas Bourse" et j'en passe. Je brûlais la chandelle par les deux bouts. Je voulais rattraper le temps perdu. J'avais cessé de fréquenter les églises, sans doute avais-je perdu la foi. (enfin je le croyais)


Je fis des rencontres fortuites et sans lendemain. Rapidement je me rendis compte de la superficialité du monde "Gay". Au fur et a mesure que je fis des connaissances, je devenais de plus en plus cynique. Je devenais persuadé que l'amour véritable, ne pouvait pas exister entre gays. Tout semblait tourner uniquement  autour du sexe. J'ai rencontré plusieurs fois des garçons avec qui je croyais pouvoir vivre un amour, mais ce fût a chaque fois une déception.
Le monde "gay" est plein de jalousies de toutes sortes. Lorsqu'une relation avait l'air de se nouer, il y avait toujours une  "âme charitable"  quelque part pour tout démolir. Bref, il me semblaît que j'étais tombé dans un monde peu réjouissant.


Heureusement, je fis quand-même des rencontres enrichissantes. Il y eût entres-autres Jean-Paul, un Français de Villerupt . Il m'appelait son cher "SABENA". Je l'avais dragué dans la rue et je l'avais invité dans ma chambre. Il ne s'est jamais rien passé entre nous. Nous avions beaucoup parlé. Notre relation demeura donc purement "platonique", pourtant ce n'était pas l'envie qui me manquait. Il est venu me voir régulièrement lors de son passage à Bruxelles. De cette relation j'avais appris une chose importante : Une relation basée sur la fidélité pouvait exister entre deux gays. J'allais en avoir la preuve irréfutable quelques années plus tard.
Par la suite les évènements ont fait que je le perdis de vue. Nous étions en 1965.


Entretemps, une chambre plus spacieuse et plus lumineuse s'était libérée sous les combles. Un grande chambre mansardée avec de grandes fenêtres. Mme. S... m'autorisa de décorer la chambre a mon goût. J'achetais donc quelques rouleaux de papier peint et je retapissais la chambre. Un petit coup de peinture sur le plafond et sur les boiseries, et le tour était joué. Il y avait des étagères autour du lit double, une garde-robe, un fauteuil "Art-Déco", une table et trois chaises. Une kitchenette avec un petit réfrigérateur, un réchaud au gaz, quelques casseroles et un peu de vaisselle complétaient l'ensemble. Il y avait aussi un évier avec de l'eau courante, froide. Rien de bien spécial donc, mais pour moi c'était un "palais royal".
 
 
Entre-temps, maman avait retrouvé ma trace. Dans la lettre que j'avais laissée, j'avais mentionné qu'il ne fallait pas tenter de me retrouver. Comme j'étais adulte, cela ne leur aurait servi à rien d'aller à la police pour essayer de me retrouver. Quand un adulte quitte le toit familial, ce n'est plus une fugue, n'est-ce pas?


Maman avait alors eue l'idée brillante de contacter la "SABENA" pour obtenir mon adresse. Ne connaissant pas le département dans lequel j'étais employé, elle n'eût pas beaucoup de succès. Du moins au début. Un jour maman eût l'idée d'aller voir le Bureau du Personnel. Par-là elle obtint mon numéro de téléphone au bureau. Elle me téléphona, et demanda a me rencontrer. Je fus d'accord, à condition que ce soit sur mon territoire. Elle vint, accompagné de papa. On s'est expliqué une fois pour toutes, devant une tasse de café et un petit gâteau. Ainsi nos rapports se sont améliorés, quoi qu'il subsistait toujours un peu de réticence, qui ne s'est d'ailleurs jamais complètement dissipée. Je suppose que c'est là une réaction normale pour une maman, qui avait compris que son fils ne lui donnerait jamais des petits-enfants.


Ma vie indépendante me plût beaucoup. J'avais fait plusieurs rencontres, la plupart occasionnelles, d'autres un peu plus suivi. J'avais notamment fait la connaissance d'Albert ..., qui était Directeur artistique chez Decca. Il avait un superbe "pied-a-terre", rue Royale". Il y organisait des soirées, qui étaient très courues, il y avait toujours énormément de monde. Là je fis la connaissance d'un très charmant garçon, Pierre, qui était amoureux de moi, du moins je le pense. Il habitait à Soignies, avec sa maman et sa grand-mère. Je me rappelle que je m'entendais bien avec eux. Pierre était très gentil et d'une grande douceur. mais j'avais décidé qu'il n'était pas mon "Type" de garçon. En vérité, je suppose que nous aurions pu très bien vivre un bel amour, mais après ce qu'il était arrivé avec H., je n'étais pas prêt à recommencer une liaison ... Lui non plus, je ne sais pas ce qu'il est devenu.


Le temps passait a une vitesse "V" prime. Un incident allait quelque peu calmer ma vie frénétique. Un jour je m'étais fait draguer à la Bourse par un superbe gars, beau comme une statue grecque et vous connaissez mon goût pour ces oeuvres antiques. Je l'invitai prendre un verre à la taverne du "Roi d'Espagne" sur la Grand' place. Pendant que nous consommions notre bière, deux hommes se sont installés à la table voisine. Je les avais déjà aperçu dans les parages et je savais qu'ils étaient en réalité des policiers de la brigade des mœurs. Après avoir terminé nos bières nous sommes partis vers mon flat. On s'est fait rattraper par les deux policiers en civil, qui nous ont séparés et emmenés vers le poste de Police, a deux pas de là... En réalité, le gars qui m'avait dragué servait d'appât au policiers. Je m'étais fait piéger comme un gamin. Quelle traîtrise !!! Voilà les agissements ignobles de la police à l'époque. Au lieu de traquer les pédophiles, les violeurs de gamines, les agresseurs de vieilles dames, ils préféraient passer leur temps a "piéger du pédé". C'est vil, c'est bas, c'est ignoble. On ne sait pas combien de gays, traumatisés, se sont suicidés a cause de tels agissements imbéciles.
Au poste de police je fus interrogé et on m'a fiché comme un vulgaire criminel. Quelques mois plus tard je fus convoqué au tribunal de police, pour y être accusé et condamné pour "Sollicitation sur la voie publique". Alors que c'était l'autre qui m'avait "sollicité", moi. Toujours est-il que je fus condamné a 3 mois de prison avec sursis, puisque c'était la première fois (et la dernière) que j'avais été accusé de ce genre de faits. Il y avait cependant une condition: Je devais me faire soigner par un spécialiste reconnu par le Ministère de la Justice, et que je fasse des visites régulières chez un "Officier de Probation". Bien entendu je fis ce qui me fut demandé. Et j'ai fait gaffe de ne plus me faire prendre dans des lieux publics. Heureusement il y avait les bars. Cette épisode montre bien comment les choses ont -heureusement- changé depuis... J'ajouterai que le "spécialiste reconnu par le Ministère de la Justice" n'a pas fait de miracle ...



Plusieurs mois ont passés durant lesquels je vis régulièrement le spécialiste et "l'Officier de Probation"; Je n'eus plus de problèmes et la vie continua son petit bonhomme de chemin.
Mon travail à la "SABENA" me permettait de voyager gratuitement et j'en ai profité a plusieurs reprises. Je suis notamment descendu sur la Côte d'Azur au Cros de Cagnes, ou des amis Ucclois étaient descendus avec leur caravane. J'avais été invité à passer une semaine avec eux. Ce fut un court, mais agréable séjour.


Une autre fois je suis allé en Angleterre, à Manchester, où j'ai passé une nuit à l'hôtel ou était descendu l'équipage de l'avion. Le steward, que je connaissais et qui était Gay lui aussi, m'invita, après un petit mot avec le Commandant, à loger dans sa chambre, pour m'éviter des frais. Je partageai donc son lit, mais il ne s'était rien passé. Nous avons dormi sagement. Il avait un ami, et il était fidèle. (Hé oui, ça existe)


Pourtant ce n'est pas l'envie qui me manquait, mais je respectai sa volonté.
Entre-temps, nous étions passés en 1966. C'est dans le courant de cette année, que brusquement ma "petite" vie sordide allait changer radicalement et prendre une tournure inattendue. Et qui serait définitive pour mon plus grand bonheur ...



J'étais sur le point de tomber éperdument amoureux....

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